Inanna
Aussitôt
l’acte expédié, mon logeur se dégagea avec lourdeur d’entre mes
cuisses. Une obscurité presque totale régnait à présent dans la pièce ;
elle me permit cependant de distinguer son regard s’appesantir là où
s’écoulaient les bavures de son passage. Me complaisant dans mon vice
naissant, il me plut de rester ouvertement exposée, la vulve encore
béante de ce qu’elle venait de contenir.
Il me quitta en silence, penaud.
Je
gardai ma position après son départ, étonnée et dépitée du manque de
sensation lorsqu’il s’était déversé en moi. J’entrepris d’atténuer la
frustration de ma fente inhabituellement trempée d’un doigt rageur et ne
pus résister à l’envie de goûter la semence visqueuse qui s’écoulait du
calice débordant. Je retrouvai la saveur – un peu plus accentuée, mais
toujours plaisante au palais – que j’avais finement prisée. Je mis donc
toute ma ferveur à extraire le miel récolté, allant même jusqu’à
m’accroupir pour le recueillir dans ma main placée en coupe sous ma
vulve.
L’intempérance de la soirée s’étant dissipée, je restais
contrariée et ne parvins qu’à sommeiller jusqu’au matin, perplexe et
anxieuse. Perplexe puisque ma désillusion était à la hauteur de ma naïve
attente : j’avais si souvent fantasmé cet instant en croyant
innocemment connaître d’émoustillantes sensations. Anxieuse, car bien
qu’ayant suivi à la lettre les prescriptions de mon gynécologue, mon
esprit troublé me laissait craindre un possible impair.
L’homme,
tôt levé en toute circonstance, semblait absorbé dans la lecture de son
quotidien lorsque je me présentai dans la cuisine. Sans relever la tête
du journal, il s’inquiéta d’emblée de mon état :
— Comment vas-tu ?
Étouffant un bâillement, je mentis :
— Merveilleusement bien, et toi ?
— Hum, hum… tu as bien dormi ?
— Moyennement, j’ai dû trop penser à toi.
Je vis sa mine se rembrunir, me faisant aussitôt regretter ma stupide malice.
— Ne t’inquiète pas, je blague !
— Tu m’en veux pas ?
— T’en vouloir ? Pourquoi donc ?
— Ben… pour hier soir… ce qu’on a fait…
— Alors, primo : j’étais d’accord, et même demandeuse ; secundo : j’y ai pris du plaisir. Satisfait ?
— Mais… euh… tu prends vraiment la pilule ?
— C’est donc ça : tu crains de me mettre enceinte ?
Je
vis son regard inquiet peser sur moi. Voyant qu’il fallait réellement
tranquilliser le bonhomme, je m’assis près de lui, lui pris amicalement
le bras et le sécurisai :
— Continuellement, tu n’as aucune crainte à avoir… si tu veux continuer à me faire l’amour.
Un sourire mutin dérida son visage.
L’état
de santé de mon hospitalier hébergeur s’améliorait perceptiblement au
fil des semaines. Selon un rituel immuable, notre relation hebdomadaire
se prolongea tout l’hiver. Chaque samedi soir, mon logeur me rejoignait
dans ma chambre, le bout du sexe en ébullition jaillissant impudemment
de la traditionnelle parure bigarrée. Cependant, notre sexualité se
maintenait sur un égal registre : après nous être mutuellement taquinés
de quelques coups de langue, nous copulions sans trop de fantaisie ; il
me quittait aussitôt après s’être répandu.
Une seule fois, vers
la fin de nos « échanges de services », l’habituel batifolage prit une
direction moins attendue. Nous étions en début d’après-midi. Après avoir
devisé plus que d’habitude lors du repas pris en commun, je
débarrassais la table après le goûter ; sa main, singulièrement plus
leste ce jour-là se porta hardiment sur mon postérieur et ne se priva
pas d’aduler mes fesses au travers du boxer-short que je portais à même
la peau.
Comme je m’employais à la vaisselle, il se leva pour
venir renouveler sa ferveur sans le moindre embarras. Mieux : je le
laissai impunément me peloter tout en m’activant à la plonge. Il vint se
coller contre moi ; ses mains glissèrent avec une véhémence contenue
sur mes hanches, entraînant dans leur mouvement la lente descente de mon
short. Les mains prisonnières de la mousse, je me retrouvai le derrière
à l’air. Le sale gamin, fier de sa farce, en profita pour le palper
avec un toupet que je ne lui connaissais pas encore. Ses doigts osèrent
sonder mon fondement et accentuèrent leur fouille au-delà de ma partie
charnue.
Je prisais particulièrement l’impérieuse exploration qui
me rendait incapable de me concentrer sur ma besogne. Victime d’une
condamnable aspiration, je savourais cette appétence redoublée avec une
salace délectation. Non content de me pétrir d’une main, l’homme se
massait dans le même temps le bas-ventre pour en calmer l’impatience.
Je
reconnus le bruit d’une ceinture que l’on dégrafe, suivi de celui non
moins caractéristique d’une fermeture à glissière. Instinctivement, je
présentai mon fessier en arrière, écartant les jambes au maximum de ce
que m’autorisait le boxer tendu entre mes genoux.
Un bruissement
de tissu froissé ; le claquement d’un élastique. Les yeux clos,
lubriquement offerte, j’imaginais l’homme extraire de sa braguette la
cheville qui allait me combler… Je tressaillis lorsqu’il me plaqua
contre son abdomen proéminent d’un bras enroulé autour de mes reins. Sa
main libre se coula sous mon ventre, s’attarda peu sur le satin de mon
pénil avant de se glisser dans ma douce cicatrice.
— C’est qu’tu mouilles, p’tite gredine ! parvint-il à articuler, déjà haletant.
Les
fesses collées à son ventre, je m’offrais au mieux pour assouvir notre
vibrante pulsion. C’était sans compter sur la trop courte taille du
pauvre bougre qui, associée à celle de son instrument, ne parvenait à se
mettre à la hauteur nécessaire pour atteindre sa cible. La tête bien
dégagée de son outil sonda inutilement le sillon placé trop haut,
cherchant vainement à s’introduire dans l’encoche qui lui procurerait le
refuge velouté qu’il convoitait. Je tentai tout aussi infructueusement
de l’introduire en moi, mais nos dispositions respectives s’y opposèrent
formellement.
— Fichtre ! J’vais bien réussir à te prendre, ma cocotte.
Il
m’obligea à m’écarter davantage. Je me débarrassai de ma gênante
frusque par quelques tortillements. Je me retins à un meuble bas pour
pouvoir fléchir les jambes et parvins cette fois à m’aligner pour un
parfait alliage de notre dispositif d’emboîtement. Par crainte de
quitter la place si chèrement conquise, il me tint fermement par les
hanches pour me besogner à petits coups de reins.
Il ahanait :
— Ah, coquine ! T’aimes ça, hein ?
Je
le laissai s’époumoner, préférant apprécier les secousses de ses
lourdes génitoires qui me battaient la motte. Je passai une main sous
mon ventre pour les flatter et les soupeser. Ce fut loin de l’apaiser :
il lâcha un cri et se libéra aussitôt en un abondant débordement
grumeleux qui ruissela en partie sur le sol.
Aussitôt qu’il se
retira, je courus dans la salle de bain, pinçant les lèvres de ma vulve
dilatée entre les doigts pour éviter la perte du collant liquide qui
s’en écoulait. Sans même prendre soin de refermer la porte, je m’assis
sur le bidet, jambes ouvertes, et contemplai passivement le dégorgement
de l’épaisse semence.
Après avoir soigneusement essuyé mon sillon
gluant, je retournai à ma chambre. Je ne jugeai pas nécessaire de me
vêtir autrement qu’enroulée à la taille d’une serviette de bain qui
traînait sur le bout de mon lit. De retour dans la cuisine, je constatai
que mon étalon n’avait pas changé de place. En revanche, il avait
proprement remisé ses attributs et me fit remarquer que ma culotte était
sous la table. Sous ses yeux ébahis, je repris mon cache-sexe… et
décidai de ne pas le remettre.
□□□
L’habituelle
conjonction de nos corps ne se fit pas ce soir-là, mais j’obtins
cependant ma seconde ration de la journée, certes moins abondante, de
cette boisson que je commençais à apprécier à sa juste saveur. Ce
premier intermède nous ayant agréablement divertis, la teneur de nos
conversations prit un tour plus polisson, d’autant plus que je me
présentais toujours les seins nus et sans le moindre parement sous mon
paréo improvisé.
Ce dernier point – qui n’était nullement un
mystère – avait le don d’aviver chez mon comparse un regain d’intérêt
pour cette partie de mon anatomie, surtout lorsqu’elle lui apparaissait
fugitivement sous mon cotillon. En parfaite connivence, nous nous
amusions tous deux de cette complicité grandissante qui nous amenait à
nous acoquiner. Je ne me gênai donc pas, en cette fin de journée, pour
prendre des poses singulièrement suggestives et faire virevolter ma
jupette de fortune ou me baisser plus que de raison pour reprendre un
objet qui m’avait délibérément glissé entre les doigts.
À force
de tentations, un instant où je fus à sa portée, il me saisit par la
taille et me bascula en travers de ses genoux. Je me retrouvai vite
retroussée, le popotin crûment exposé. Ne voulant surtout pas
compromettre ma chance d’être une fois de plus lubriquement tripotée, je
lui laissai toute latitude pour ce nouveau jeu érotique qui s’amorçait.
Ma
disposition égrillarde se décelant, je m’imaginai jeune fille offerte à
un vieil érotomane au tempérament salace irrépressible. Avec volupté,
je le laissai m’écarter les fesses et inspecter méticuleusement mon
secret de femme dans ses moindres replis. Le rythme de sa respiration
s’accéléra – en voyant les dernières traces de son passage ? – et il dut
toussoter plusieurs fois pour retrouver un souffle plus régulier.
À
ce jeu de dupes, nos sens ne se trompèrent pas ! Nos véritables natures
firent surface, sans fard, sans pudibonderie ou toute autre forme
d’hypocrisie. Après m’avoir suffisamment auscultée, il relâcha la
pression de son étreinte, ce qui me permit de me relever et de me
ventiler plus aisément.
Ma parure retomba, cachant ces charmes
dont il ne semblait pas vouloir se lasser. D’une humeur toujours aussi
guillerette, il me prit la fantaisie de tournoyer sur moi-même pour les
lui laisser entrevoir sous mon atour. Voulant une nouvelle fois
m’attirer à lui, il agrippa le virevoltant tissu si fort que le nœud qui
le retenait n’y résista pas. Je me retrouvai devant lui nue, ma petite
fente luisante égayant son regard facétieux.
Je prenais plaisir à me
montrer à mon complice dans un dépouillement total ; il me fallait
poursuivre cette affriolante récréation. Une volonté outrancière me
traversa l’esprit :
— Fais comme moi : mets-toi tout nu.
Je
voulus le dépouiller à son tour mais, ses habits montrant plus de
résistance que les miens, il dut se lever de sa chaise pour se dévêtir.
Ses vêtements volèrent un à un au travers de la pièce. Fièrement campé
au milieu de sa cuisine, ventre en avant, il s’empressa de faire glisser
son caleçon sur les genoux pour me présenter le noble assemblage qu’il
me tardait de savourer.
— J’ai tiré mon coup ce midi ; taille-moi une pipe !
Ne
prenant aucun ombrage de la vexante invective, je m’agenouillai entre
ses cuisses et pris en main l’épais membre déjà dressé au-dessus de ses
deux fidèles affidés. Je le manipulai avec soin et entrepris l’entretien
de ce drôle de fusil en l’embouchant sans plus attendre. Sa main appuya
sur l’arrière de mon crâne, forçant la plongée du canon encore chaud
entre mes lèvres insatiables. Il ne me fallut que peu de temps pour
sentir les derniers projectiles s’éjecter de la truculente artillerie.
Je
suffoquais en raison de la grosseur de son phallus qui m’étirait la
mâchoire. Pourtant, c’est sans ciller que je reçus la brûlante explosion
sur le palais et la langue avant de le retirer, mollement assouvi,
d’entre mes lèvres écumeuses. Je pus reprendre ma respiration et
ingurgiter jusqu’au dernier globule de sa copieuse émission ; je pris
même soin de rapatrier avec la verge molle ceux qui me pendaient au
menton ! Inutile de préciser que j’étais euphorique à l’issue de cette
réciproque délectation.
□□□
À la
suite de ce plaisant face-à-face, nos liens se délitèrent. Nos rapports
devinrent plus distants ; un sentiment mêlé de honte et de repentir
agitait mon loyal logeur. Pour ma part, je n’avais aucun regret. Son
état de santé s’étant considérablement amélioré, notre collaboration
prit fin d’un commun accord peu après cette mémorable journée.
Je
retrouvai la solitude des longs week-ends dans ma petite chambre
d’étudiante, les ennuyeuses rêveries sur mon lit déglingué. Je
n’arrivais pas à me défaire de l’empreinte laissée par ces nouvelles
expériences qui picotait mon désir de sexualité. J’aurais tant voulu
connaître d’autres émotions... Celles que j’avais connues me laissaient
toutes une sensation d’inachevé, et j’étais bien incapable de mettre des
mots sur cet effet de manque qui me poursuivait. Une seule chose était
sûre : il me fallait trouver un moyen de revivre de semblables
aventures.
À force de fixer mon ordinateur portable sur ma «
tablette-bureau », une idée germa : était-il possible de prendre contact
avec d’autres personnes partageant les mêmes désirs d’érotisme et de se
mettre en relation ? Était-ce même envisageable ? Je n’avais pas la
moindre notion de la manière de m’y prendre, mais le meilleur moyen
était certainement de trouver un site de rencontres. Un moteur de
recherche m’en donna d’emblée une liste faramineuse. Après quelques
infructueuses explorations, de comparaisons, de publicités invasives –
voire franchement agressives – l’un d’entre eux attira plus
particulièrement mon attention.
Ce site offrait un service
gratuit – certes limité – mais ne demandait aucune donnée personnelle :
un atout supplémentaire pour qui veut garder un certain anonymat.
L’inscription était étonnamment simple et ne réclamait que la création
d’un pseudo. Après trois tentatives infructueuses – ils étaient déjà
utilisés – il me fallait faire preuve d’un peu plus d’imagination,
d’autant que des noms « alambiqués » m’étaient automatiquement affectés
en remplacement.
Un livre traitant de mythologie [1],
récemment emprunté à la bibliothèque de l’université, traînait en
évidence sur ma table de travail. Le feuilletant au hasard, je
m’attardai sur un passage croustillant :
Ma vulve, la corne,
La Barque des Cieux
Est pleine d’ardeur comme la jeune lune.
Ma jeune terre non-cultivée en jachère.
Qui pour moi, Inanna,
Qui labourera ma vulve ?
Qui labourera mon haut champ ?
Qui labourera mon sol humide ?
La Barque des Cieux
Est pleine d’ardeur comme la jeune lune.
Ma jeune terre non-cultivée en jachère.
Qui pour moi, Inanna,
Qui labourera ma vulve ?
Qui labourera mon haut champ ?
Qui labourera mon sol humide ?
Un
prénom, d’une résonance agréable, y figurait. Je décidai de retenter ma
chance avec ce patronyme bien plus original ; cette fois, il fut
accepté sans difficulté. C’est ainsi que, pour la communauté des âmes
esseulées, je devins INANNA.
Je
fus d’emblée assaillie par de nombreux messages émanant d’hommes,
excessivement jeunes pour la plupart, dont la « poésie » était fortement
dissuasive. Heureusement, j’apprivoisai vite ce nouvel outil, ce qui me
permit de cibler par moi-même des personnes aux profils plus
compatibles avec mes nouveaux penchants. Fuyant expressément les « moins
de quarante ans » et ceux dont la prose était bien plus qu’hésitante,
je parvins à nouer quelques dialogues plus constructifs.
Je pris
l’habitude de me connecter à des heures régulières, en fonction de mon
emploi du temps et des jours de la semaine. Cette disposition facilita
une conversation de plus en plus fructueuse avec une poignée de
correspondants. Au fil des échanges, ma sélection se peaufina ; quelques
postulants se virent évincés, d’autres furent ajoutés.
Un mois
plus tard, bien que l’expérience – au final décevante – ait tourné
court, je restai en contact avec un homme d’une quarantaine d’années. Il
se disait divorcé, se considérait comme un « hédoniste voulant ajouter
un épisode enchanteur à sa vie » et ne pas rechercher une relation sur
le long terme. Puis ses messages, toujours polis et distingués, prirent
une tournure plus polissonne… et finalement davantage en adéquation avec
mes attentes. Nous n’osions, ni l’un ni l’autre, nous dévoiler
pleinement, mais nos allusions et nos sous-entendus devinrent si
manifestes qu’il fut inutile de garder une certaine retenue dans nos
propos.
Sans tomber dans le graveleux, notre oaristys, de plus en
plus explicite, livra essentiellement nos fantasmes bien plus que nos
désirs réels. Avouer quelques idées épicées était une chose ; oser le
passage à l’acte en était une autre. De déclarations d’intention en
confidences – par ailleurs inavouables – nous confessâmes nos penchants
secrets.
Lui : sa vénération pour le corps féminin qu’il aimait
découvrir ; par la vue tout d’abord, pour ensuite l’effleurer du bout
des doigts et poursuivre par une exploration plus en profondeur…
De
mon côté, je lui avouai mon culte naissant au dieu Priape, à sa gerbe
glorieuse qu’il m’offrait en reconnaissance à ma dévotion…
Après
moult réticences, je cédai à la tentation de le rencontrer et il fut
convenu que, ne pouvant l’un comme l’autre recevoir dans des conditions
dignes, un premier rendez-vous pouvait se faire près de mon logement
estudiantin.
Le port du pantalon m’étant défendu, je devais
impérativement me présenter en jupe ; les dessous affriolants n’étant
pas, eux, prohibés. Il prévoyait une balade en forêt, comme un couple
amoureux, histoire de mieux se connaître dans un premier temps et de
s’isoler dans un recoin plus ombragé pour satisfaire certaines pulsions…
si nos corps s’accordaient entre eux.
Auteure : Inanna
Lisez la suite
[1] – Inanna, Queen of Heaven and Hearth : Her Stories and Hymns from Sumer – Diane Wolkstein & Samuel Noah Kramer.
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