mardi 21 février 2017

New-York darkness (8)

Relire le chapitre 7

CHAPITRE HUIT : Soucis

Le soir, un peu avant 11 heures, je suis entrée sans frapper dans la chambre de Lewis. Il lisait un roman de poche, allongé sur son lit et seulement éclairé par une petite lampe de chevet. Était-il surpris ? Il n’a pas bougé, me regardant approcher par-dessus son livre. J’ai enlevé le grand tee-shirt qui me servait de chemise de nuit et l’ai lancé sur la chaise près du lit. Raté de peu ; tu t’améliores, Steph…

— Tu es sûre que c’est ce que tu veux ?
— J’ai vu la mort d’assez près déjà ; je l’ai appelée même parfois quand je souffrais trop. Je ne sais pas si je passerai l’année. Alors oui, c’est ce que je veux.
— Viens.

Je me suis coulée contre lui, contre son corps fait de muscles et d’os. Je n’étais guère différente à force de privations, d’ascèse et de sport extrême. Nous nous sommes embrassés tendrement puis avec fougue, nos langues s’enlaçant et s’emmêlant. J’avais saisi sa nuque à deux mains alors que les siennes plaquaient mon ventre contre sa virilité dressée et raide. Puis il m’a retournée sur le dos, et d’instinct j’ai écarté les cuisses. Il s’est guidé en moi puis s’est immobilisé, le gland introduit à peine dans mes nymphes. Je lui ai souri avant de murmurer :

— Viens, doucement s’il te plaît, j’ai peur.

Il a pesé doucement ; mon vagin était trempé mais étroit. Des mois d’abstinence, les tortures... Je me suis crispée et quelques larmes ont coulé au coin de mes yeux clos. Il était en moi, épais et dur ; je ne sentais que ça, ce barreau de chair qui allait me blesser. Ma peau se couvrait de chair de poule ; je retins un cri de panique. Et respirai lentement, profondément, pour chasser la terreur qui m’envahissait. Mon seul contact avec Lewis était son sexe planté dans mon vagin car il me surplombait, maintenu au-dessus de moi sur ses bras tendus.

— Regarde-moi s’il te plaît. Steph, ça va ?
— Je ne sais pas... Fais-moi jouir, je t’en supplie.

Si ça va ? Mon Dieu, non : j’ai peur comme je n’ai jamais eu peur, le ventre noué dans la crainte des tortures que j’ai subies, que j’allais subir à nouveau, inévitablement… Inspire doucement, retiens ta respiration, recommence lentement, il ne te veut pas de mal, pas lui. Respire, ce n’est pas lui, le diable qui hante encore tes nuits.

— Attends, Steph. On va faire autrement : c’est toi qui vas diriger à ton rythme, comme tu le sens…

Il s’est retiré lentement de moi et j’ai poussé un petit soupir, regret et délivrance. Puis il s’est allongé sur le dos et a caressé mes hanches. J’ai essuyé discrètement les larmes sur mes tempes et j’ai enjambé le ventre aux abdos sculpturaux. Discrètement ? Pas tant que ça ; Lewis a emprisonné délicatement ma tête pour plonger ses yeux dans l’humidité des miens.

— C’est rien, Steph. Tu fais ce que tu veux, je ne t’en voudrai pas. Tu n’es pas obligée de... Oh !

J’avais guidé sa verge au centre de ma grotte et m’étais laissée glisser en arrière, m’empalant d’un coup presque à fond. Aucune douleur physique, et pourtant les larmes ont coulé à nouveau, des larmes que Lewis a bues après m’avoir tirée à lui. Aucune douleur physique, et pourtant la chair de poule couvrait mes bras. Mes épaules se crispaient et ma gorge se serrait. J’ai répondu d’une voix cassée :

— Si, il faut que je le fasse. Il faut que je surmonte ma peur sinon je n’oserai plus jamais faire l’amour. Alors merci de me supporter malgré ma trouille.
— Tu es la fille la plus courageuse que je connaisse, Steph. Tu es prête à tout donner pour tes amis et tu les rends meilleurs. J’ai parlé avec Alice : non seulement elle ne regrette pas sa vie de comptable, mais elle est fière d’être ton amie. Même Angel est sous ton charme, c’est dire…

Il caressait mes seins qui réagissaient presque malgré moi. Les aréoles avaient gonflé et durci sous ses doigts habiles et ma respiration se calmait, mon angoisse refluait. J’ai osé me mouvoir lentement sur sa verge qui distendait presque douloureusement mon vagin. Presque. Mais mon ventre avait choisi pour moi ; il ruisselait de cyprine sur son envahisseur et l’acceptait déjà.

Mon amant caressait maintenant mes hanches et mes fesses, et sa respiration me semblait plus entrecoupée qu’auparavant alors que j’amplifiais mes mouvements. Son mandrin épais coulissait de mieux en mieux dans mon fourreau.

— Tu es étroite, Steph ; ça va ? Tu as repris des couleurs.
— Je suis bien, merci ; et ça y est, je n’ai plus aussi peur...
— Continue, prends ton temps surtout ; moi, je suis au paradis.

Mon bassin ondulait presque malgré moi, renouant avec la gestuelle millénaire des jeux de l’amour ; et si mon souffle se déréglait, l’angoisse n’en était plus la cause mais la montée graduelle du plaisir. Choyée et cajolée par les paumes tendres et chaudes de Lewis, je perdis pied et fus emportée dans un orgasme que je n’avais pas senti survenir. Un cri rauque m’a échappé alors que ma vision se brouillait, et je suis tombée mollement en avant sur le torse musclé, béate, enfin repue.

En chantonnant, Lewis caressait mes cheveux, et je restai un long moment blottie contre lui avant de réaliser que son sexe toujours aussi raide était encore fermement planté dans le mien. Il palpitait et tressautait doucement.

— Tu n’as pas joui...
— Non. Mais ça ne fait rien. Je ne cèderais ma place pour rien au monde. Ne bouge pas, s’il te plaît.
— Ce n’est pas juste, Lewis.
— La vie n’est pas juste. Tu ne le sais que trop.
— C’est vrai, mais là je suis si bien... Ça fait des mois que je ne me suis pas sentie si bien, protégée et... aimée.
— Je te promets de t’aider à retrouver ta vie d’avant. Mais je ne pourrai jamais vivre avec toi et Jason, j’ai ma vie ici.

Sa voix me provenait de loin, de plus en plus loin ; je me suis endormie sur lui, la tête sur son épaule et nos corps intimement emboîtés. Quand je me suis réveillée, j’étais seule et désorientée ; la seule lumière provenait de la lampe de chevet, et j’ai mis quelques secondes avant de me rappeler où j’étais. Puis tout m’est revenu et je me suis étirée en souriant. Rassurée. Je me suis levée pour appuyer sur un interrupteur près de la porte ; un double tube néon s’est illuminé en bourdonnant.

Là, pour le coup, je n’ai pas retenu mon rire : la chambre, outre le grand lit, était emplie de trophées de combat et de posters de légendes du sport. Mohamed Ali, Bruce Lee, Maurice Smith, Evander Holyfield, Mister Bean… Oui, je vous jure, il était là au côté des plus grands combattants, et j’ai ri encore devant son regard démoniaque qui semblait me suivre. Lewis est entré sur ces entrefaites et a paru surpris de mon hilarité. Surpris et heureux. Et autre chose aussi, de me voir debout et toute nue au milieu de la chambre, à virevolter sur la pointe des pieds.

— Ta déco est surprenante. Bonjour, Lewis.
— Salut. Tu as envie d’aller courir ce matin ?
— Je suis partante, mais je vais essayer de me restreindre. Un six ? (six miles, soit à peu près dix kilomètres). J’aimerais travailler plus le free fight à la place.
— Pas de souci. Et Alice ?
— Je vais lui demander, même s’il faut la réveiller.

Alice dormait profondément, complètement abandonnée ; je l’ai couvée un long moment d’un regard aimant et protecteur avant de secouer doucement son bras. Ses yeux se sont ouverts et ont papilloté avant de se fixer sur les miens. Puis elle a gémi en s’étirant.

— Oh ! Non, déjà l’heure ?
— Oui ma jolie ; on se fait un six, ça te dit ?
— Pas de marathon ce matin ? Dommage... J’arrive, mais embrasse-moi.

Je me suis coulée contre elle pour l’embrasser sur la bouche ; si elle a été surprise, elle a accepté ma langue en s’ouvrant aussitôt, et ses mains ont croché dans mes cheveux courts pour prolonger le baiser. Nos salives se mélangeaient alors que nos langues dansaient ensemble, et je me surprise à gémir de plaisir. Puis Alice me libéra et sourit.

— Dommage, chérie.
— Je te promets une douche torride. Allez, grouille-toi ; Lewis est prêt et nous attend.

À compter de ce jour, nos footings quasi quotidiens n’ont plus dépassé six miles ; j’avais fini de me punir. Alice est venue systématiquement avec nous, heureuse de voir que la tristesse s’était éloignée de moi. Bien sûr, tout n’était pas parfait, loin de là ; Jason, Anita, Cléa me manquaient énormément, Miami et surtout son climat presque autant. Je ne suis pas une fille du froid, et l’hiver s’annonçait rigoureux, même pour les New-Yorkais. Décembre approchait et il gelait tous les matins ; je n’étais pas habituée à voir ma respiration se transformer en brume glacée devant ma bouche, et je ne le serais sûrement jamais.

Alice avait monté une double comptabilité pour la BGF qui brassait pas mal d’argent avec la musique. Je l’avais aidée comme j’avais pu, mais c’était surtout l’occasion de franches rigolades avec Angel qui nous couvait comme ses petites sœurs, comme Rhonda.
Les nouvelles de Miami étaient encourageantes : Jason allait mieux et avait fini toute rééducation ; il avait quitté Berkeley et était revenu dans sa maison sous protection. Et surtout, Anita avait réussi à coincer plusieurs membres de la famille Duvallier. Enfin, à coincer... À liquider, discrètement. Il restait deux frères qui l’inquiétaient, car l’un d’eux semblait avoir travaillé comme tueur pour la CIA en Amérique latine. C’était un dur bénéficiant encore de protections par l’Agence.

Moi, je rongeais mon frein, vivant au jour le jour. Angel ne me demandait plus de partager son lit ; il avait rencontré Solene, une superbe chanteuse black archétype de la bombe sexuelle du milieu rap. À peine dix-huit ans, poitrine siliconée, lèvres pulpeuses, et une voix de crooneuse qui faisait se dresser les poils sur la nuque. Associez à tout cela une vive intelligence et vous comprendrez qu’Angel n’avait pas l’ombre d’une chance de s’en tirer.

Avec Lewis, nos relations s’étaient stabilisées ; nous ne parlions plus jamais d’amour et nous le faisions deux fois par semaine, parfois trois. À mon initiative seulement ; quand les appels de mon corps se faisaient trop pressants, quand mon cerveau en avait marre de lutter, je le rejoignais dans sa chambre et me déshabillais rapidement. Il écartait sa couette et je me coulais contre lui en frissonnant de désir, retenant un gémissement lorsque son bras se refermait sur mes reins pour me coller étroitement à son torse.

Nous nous caressions et je m’ouvrais lentement à ses doigts et à sa langue ; il savait me faire vibrer et me conduire au seuil de l’orgasme sans le franchir, me laissant pantelante et frustrée pour mieux recommencer une minute après. Sa langue était diabolique quand il la plongeait loin dans mon vagin torride pour me laper avant de faire rouler mon clitoris. De ses doigts joints, il préparait souvent mon anus ; je ne lui refusais rien : il me prenait à sa guise et me conduisait au nirvana au moment qu’il avait choisi. Nous faisions l’amour en silence, mais par nos yeux passaient tous les mots que nous ne prononcions pas, que nous ne prononcerions jamais.

Fin novembre, Alice m’a demandé si je pouvais l’aider à récupérer ses affaires stockées chez Aminata.

— Grande nouvelle, Steph : tes copines quittent le Moon’, quittent New-York, et partent en Californie ; elles vont reprendre un 7-eleven à côté de San Diego.
— Génial ! Elles partent quand ?
— Elles finissent au Moon’ ce vendredi, après-demain. Et elles prennent l’avion avec leurs familles le dimanche.
— Bon. Samedi, on se fait une sortie entre filles, Alice. On se débrouille pour être au Moon’ à 11 heures.
— Et Delmonte ?
— J’espère qu’on ne le verra pas. Je l’espère pour lui. Je lui en veux toujours un petit peu.

Il faisait un temps hivernal sur Big Apple ce vendredi soir ; nous sommes arrivées en taxi devant l’entrée du bar et nous sommes ruées à l’intérieur après que j’eus payé la course. Carmen nous a repérées tout de suite et nous a fait un clin d’œil appuyé à la Betty Boop. Le temps de nous asseoir après avoir enlevé nos manteaux et Joe Cocker a attaqué. J’ai frémi et retenu mon souffle ; par un réflexe pavlovien, j’avais failli me relever pour me déshabiller…

Ami a fait glisser son short et le posa sur le comptoir, mais ses yeux ne nous quittaient pas et son sourire dévoilait une belle rangée de dents à la blancheur nacrée. En poussant des cris de joie, les deux jeunes femmes sont ensuite venues nous embrasser et nous serrer contre elles, sous l’œil des deux barmen et de la jeune serveuse potelée qui m’avait remplacée. Après de sincères et longues effusions, Carmen a dû nous laisser pour bosser, et Ami s’est inquiétée :

— Dites, les filles, faites attention. Monsieur Delmonte a une dent contre vous et je ne serais pas surprise qu’il déboule.
— T’inquiète, Ami. Je gère, lui ai-je répondu avec assurance.
— J’ai pas envie qu’il vous arrive malheur ; nous, on en a fini avec lui et on ne risque plus rien ; mais vous deux…
— Ça ira, je t’assure. On sortira avec vous, à la fin de votre service, et on vous accompagnera jusqu’à la bouche de métro. Merci, vraiment, Carmen et toi êtes des amours. Faudra nous laisser vos coordonnées en Californie, hein ?
— Je les ai, Steph, t’inquiète pas, glissa Alice d’une voix douce.
— Bon, quatre margaritas, s’il te plaît ! On va fêter dignement votre départ !

Nous avons passé deux heures agréables à discuter avec nos amies, de manière sporadique car elles devaient assurer le service des autres tables. Je me suis rendu compte que, vu sous l’angle du client, le Moon’ était un lieu chaleureux : bonne musique jazzy, décoration simple mais clean, ambiance cosy. Bon, les serveuses en petite tenue, ce n’était pas mon trip non plus.

À la fermeture, les filles sont allées se changer et sont revenues avec les deux grosses valises d’Alice. Nous sommes sorties du bar en riant et parlant fort ; il faisait de plus en plus froid et le vent devenait glacial ; je frissonnai en serrant mon gros manteau contre moi.

Quel pays ! Je ne pourrais pas passer l’hiver ici, moi ! Je finirais gelée sur place. Ouais, mais c’est mieux qu’un tiroir de morgue à Miami. Il y fait sûrement froid, et en plus c’est tout petit.

Delmonte nous a rejointes juste devant l’accès au métro. Lui et trois hommes de main, dont Archie, son gros garde du corps, qui m’a adressé une mimique d’excuse, semblait-il.

— Alors, Steph, on vient pas dire bonjour à son gentil patron alors qu’on passe boire un coup au Moon’ ? On préfère rester avec sa copine gouine et les deux putes qui me laissent tomber ?
— Tu résumes bien la situation, Carlito. Bon, les copines, vous pouvez y aller ; Alice vous donnera de nos nouvelles. Ne ratez pas votre train à cause de ce trou du cul.

Embrassades rapides pendant que l’autre connard manquait d’air et virait au violet ; Ami et Carmen ont dévalé l’escalier en vitesse, nous laissant avec les quatre hommes. Je me suis tournée en souriant vers Archie, impassible maintenant.

— Archie, je t’aime bien et je ne voudrais pas qu’il t’arrive malheur. Alors dégage et cherche un autre boulot. Ton ex-patron va prendre des vacances. Il est très fatigué, même s’il ne le sait pas encore.
— Salope ! Je vais vous faire regretter d’avoir croisé mon chemin, à toutes les deux !

Trois ombres se sont matérialisées près de nous, lentement, silencieusement. Trois ombres dans la nuit, sur ce trottoir désert et mal éclairé de Greenwich. Angie, Lewis et un autre Black en qui je reconnus, à ma stupéfaction, le boxeur avec qui j’avais eu des échanges musclés sur le ring. Il me salua d’ailleurs d’un petit mouvement du menton accompagné d’un sourire.

— Archie, tu es dans le mauvais camp. Je te suggère de donner ta démission tout de suite, susurra Angel à voix basse.
— Hey, Angie, tu fous quoi ici ? Ces deux putes ont tabassé un gros client black dans un de mes établissements, et tu viens les défendre ? Tu as changé de camp ? Casse-toi et laisse-nous, va boire un coup gratos dans mes boîtes de nuit.
— Non, Carlo. Et tu insultes mes amies. Alors tais-toi. Et quitte New-York, va dans les Hamptons voir s’il y fait meilleur pour toi.

Je n’ai rien vu venir, mais Carlo a sorti une arme chromée de la poche de son gros pardessus ; avant qu’il ait pu armer et tirer, Lewis lui fracassait le bras droit d’un coup de chaussure. Il portait des chaussures de sécurité à coque acier, et le craquement de l’os résonna dans le silence relatif de Manhattan ; radius ou cubitus, voire les deux. Des véhicules passaient parfois à côté de nous, des taxis jaunes principalement. Mais personne ne ralentissait ni ne faisait attention à notre petit groupe.

Archie a reculé et salué brièvement Angie avant de se fondre dans la nuit ; les deux autres sbires n’ont pas bougé, hésitant à sortir les armes qu’ils portaient. Celle de Delmonte gisait devant moi ; je l’ai ramassée et examinée : un Smith et Wesson 45, un revolver à canon très court. Lourd et à la crosse trop large pour ma main. Delmonte a vu que je ne tirerais pas sur lui et a réussi à ricaner malgré la douleur. J’ai vu rouge ; j’ai frappé avec le canon d’un mouvement tournant. Le viseur a déchiqueté sa pommette, projetant du sang à plus d’un mètre de là.

J’ai soupiré distinctement, tentant de reprendre mon calme alors que mon cœur battait la chamade.

— Bon ; ça, c’est fait. J’en rêvais depuis trop longtemps. J’hésite quand même à lui mettre une balle dans le cul…
— Je crois qu’il a compris, Steph. Il va prendre quelques vacances, notre ami. N’est-ce pas ? Et oublier tout ça, sinon il va apprendre à nager dans l’Hudson avec des chaussures en ciment. Tu as compris ? Dis-le, connard !

La voix d’Angel était basse et douce, mais personne ne pouvait ignorer la froideur et la menace contenue. Ce qu’il disait, il le ferait, sans l’ombre d’un doute. Pissant le sang, Delmonte a hoché la tête avant de poser sur sa joue un grand mouchoir blanc qui a changé de couleur instantanément. Ses deux gardes restants l’ont soutenu et l’ont évacué en traînant des pieds, le tout sans échanger un seul mot. Je me suis retournée vers mes amis en hochant la tête en signe d’approbation.

— Merci. Et surtout à toi, l’ami. Je ne connais même pas ton nom…
— Horace. Il s’appelle Horace, intervint Lewis.
— OK. Alors merci, Horace ; je regrette de t’avoir mis un poing dans la gueule l’autre fois.
— Arrête, tu as bien fait. J’avais fait le con avec toi. Une jolie blonde dans un dojo du Bronx, j’ai cru que tu étais une bourge de plus qui venait s’encanailler. Maintenant, je suis fier que tu m’aies démoli. Tu as plus de couilles que tous les Blacks du dojo – sauf ton respect, Lewis – et je serai fier si tu acceptes de tirer sur le ring avec moi.

Très sérieuse soudain devant ce compliment brut de décoffrage, j’ai donné le S&W à Alice et je me suis approchée d’Horace pour lui donner l’accolade en l’embrassant dans le cou et en lui murmurant encore un « merci ». Et c’est vrai qu’à compter de cette mémorable soirée, tous les jours Horace a été mon sparring-partner attitré ainsi que mon second instructeur de free fight.

Et puis, le 14 décembre, le coup de tonnerre. À 19 heures, un coup de fil d’Anita, affolée. Houlà ! Anita affolée ? Danger, ce doit être salement grave !

Et oui, ça l’était. Cléa avait disparu, enlevée en sortant de sa Prius devant sa maison. Pas un mot, pas le moindre coup de téléphone ou SMS pour revendiquer cet enlèvement, mais nous savions toutes deux qui était responsable.
Auteur : Matt Démon
Lisez la suite bientôt

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