mardi 1 décembre 2015

Indécences - Itinéraire d'une dévergondée (3)

Relire le chapitre 2


Rédemption


Les jours qui suivirent ces retrouvailles quelque peu gâchées furent moroses. J’ignore dans quel état d’esprit était celui dont j’avais si brusquement repoussé les avances ; pour ma part, j’étais littéralement anéantie. Consciente d’avoir brisé la douce harmonie qui s’installait entre Philippe et moi, je m’interrogeais sur ma conduite et la façon de réparer cette regrettable gaucherie. Je ressassais journellement ma maladresse, m’en voulant de ne pas avoir laissé cette liaison naissante se poursuivre de manière naturelle et spontanée. Cette rencontre, pourtant si chèrement souhaitée, ne pourrait plus se reproduire ; c’était désormais une cruelle évidence.

Le soir, en larmes, je ne pus éviter de repenser à ces sensations inédites qui avaient alimenté mes pensées une année durant. Je revivais ces moments troublants, furtifs, mais si prometteurs. Alors que se présentait la possibilité de prolonger cette histoire excitante et inattendue, je ne parvenais étonnamment pas à m’en saisir.

Comprenant qu’il me serait impossible de me soustraire indéfiniment à ces étreintes que nous appelions tous deux de nos vœux, je décidai d’adopter dorénavant une attitude plus conciliante dans notre relation. Forte de cette décision mûrement réfléchie, je me préparais psychologiquement à le retrouver, mais il me faudrait cette fois-ci faire fi de mon inexpérience et abandonner mes appréhensions si je voulais enfin découvrir ces plaisirs imprécis.

C’est avec l’esprit empreint de cette ferme résolution que je me retrouvai à parcourir ce bout de plage familier, mon loyal Granite piaffant d’impatience devant le peu d’intérêt que je portais à partager son jeu habituel.

Parvenue face à l’accès qu’une nature malicieuse se plaisait à cacher aux « profanes », je rappelai mon chien et scrutai le déplacement des rares promeneurs qui fréquentaient ce banc sableux isolé. Après moult hésitations, je ne parvenais pas à m’engouffrer dans cette brèche qui me donnait la possibilité immédiate de retrouver Philippe, dont j’ignorais s’il partageait l’envie de se revoir.

Un groupe de baigneurs s’était rapproché, je me mis à craindre que mon comportement n’attire l’attention. Me rappelant le chemin qui débouchait sur la route de sa demeure, je décidai de l’emprunter… en espérant que la providence me vienne à nouveau en aide !

Cette fois, elle ne me fut d’aucun secours.

En longeant sa résidence, je me rendis compte qu’il était incontestablement impossible d’en déceler l’existence depuis la rue. Un haut mur de pierres, que surmontait l’écran naturel d’imposants feuillus, rendait vaine toute possibilité d’exploration vers l’intérieur.

Ne me berçant plus d’illusions sur une hypothétique rencontre, je finis par en oublier l’invraisemblable éventualité et, n’osant actionner le timbre de l’entrée, me résolus à partir sans révéler ma présence.

Alors que l’horizon s’obscurcissait sous des nuages annonciateurs de pluie, l’esprit tout aussi rembruni, je m’accordai un léger détour pour une petite balade consolatrice. Tandis que mon chien me manifestait sa joie de pouvoir enfin se dégourdir les pattes, je maugréais intérieurement sur cette conception bien singulière de la sécurité pour s’enfermer ainsi derrière un semblant de forteresse dont les remparts étaient si fragiles par ailleurs…

□□□

Un violent orage s’invita en première moitié de nuit en apportant d’intermittentes précipitations.

De fortes bourrasques se prolongèrent plusieurs jours, éloignant un peu plus mon rêve d’une possible réconciliation. Ma tourmente intérieure se calma au rythme de la tempête qui sévissait au-dehors.

Enfin une belle accalmie se présenta et, craignant qu’elle soit de courte durée, je ressentis le besoin de me distraire en extérieur avec Granite. Ainsi, faisant fi d’un astre du jour convalescent, je me portai tout naturellement vers notre aire de jeu favorite pour partager ces moments de complicité avec mon chien. La crique, d’ordinaire déjà peu fréquentée, était totalement déserte en cette fin de matinée plutôt fraîche pour la saison. Une véritable aubaine pour deux comparses en manque de défoulement.

Arrivée sur la grève, au calme à peine troublé par le lancinant bourdonnement d’une tondeuse, je pensais naturellement à l’être, si proche et devenu inaccessible, qui accaparait autant mon imagination et mes rêveries. Ne voulant plus me laisser submerger par l’abattement de ces derniers jours, je voulus chasser toute forme de tristesse ; nos amusements habituels se succédèrent, de lancers de bâton en courses effrénées.

Exténuée, les joues en feu, je dus m’asseoir sur un rocher pour retrouver mon souffle. Devant mon inanition, Granite se posta à mes pieds et se mit à creuser dans le sable détrempé, relevant la tête régulièrement comme pour quémander mon approbation, reprenant de plus belle la fouille sous mes encouragements. Je me divertissais de son infatigable activité lorsqu’il se figea, le museau enfoui dans le creux déjà bien formé.

Comme il se mit à japper avec insistance, je m’agenouillai pour comprendre l’origine de son excitation : il venait de débusquer un jeune tourteau ensablé. Prenant mon remuant quadrupède dans les bras, détournant son attention pour recouvrir le crabe du sable remué, je le câlinai afin de le calmer et lui faire taire ses stridents aboiements qui perturbaient la quiétude de ce recoin oublié du monde. Mon chien, apaisé par mes caresses, semblait tout aussi ravi que moi de cette escapade et me faisait part de sa gratitude par de vigoureux lèchements que je ne parvenais pas à esquiver.

C’est sous une atmosphère qui se réchauffait sous un ciel à présent totalement dégagé que je décidai de rentrer. Tonifiée par l’air iodé, je me sentais revivre et ne ressentais plus la moindre affliction.

Comme j’empruntais à contresens le sentier menant à la plage, j’eus une fugace vision. Mon inconscient me jouait-il un tour en me donnant cette subite apparition ? J’eus l’illusion du portrait de Philippe m’apparaissant entre deux bosquets de noisetiers bordant le chemin.

— Bonjour, chère demoiselle ! s’exclama une voix au timbre familier.

Il ne pouvait s’agir d’une hallucination : ce ton si caractéristique était bien le sien. Interloquée, presque craintive, je ne parvenais plus à discerner la forme imprécise face au soleil aveuglant. La main en visière pour contrer l’éblouissement, je tentais vainement de reconnaître l’intrus. Granite, que je tenais serré contre moi, émit quelques glapissements en gesticulant d’une façon particulière que je savais interpréter : il connaissait cette personne. Reprenant avec peine mes esprits et un peu de vision, je vis l’homme dévaler prestement le talus qui nous séparait. Revêtu d’une tenue kaki, le crâne enfoncé dans une casquette assortie, Philippe m’apparut enfin distinctement, le visage hilare.

— Alors jeune fille, on n’me reconnaît plus ? Décidément, je vais devoir me faire à cette idée !
— J’avais un doute, c’est que je ne m’attendais pas à vous voir ici, tentai-je de me justifier.
— Tss… tss… Tu me tutoies… c’est un ordre !

Comme je restais pantoise, il se reprit aussitôt :

— Je plaisante ! Mais c’était notre convention et, pour ma part, ça le reste.

S’approchant, il caressa le museau de Granite qui se trémoussait de joie sous ses cajoleries.

— Lui me reconnaît… et on a plutôt l’air d’être copains tous les deux.

Devant mon mutisme persistant, il jugea bon de poursuivre :

— Bon, je me dois de te fournir un minimum d’explications… au cas où tu penserais que je passe mon temps à t’espionner. Mes voisins sont partis pour une quinzaine de jours ; je surveille la propriété pendant leur absence et m’occupe également un peu du jardin. Je terminais justement de tondre quand j’ai entendu un aboiement qui ne me semblait pas totalement inconnu. Sachant qu’une charmante personne accompagne ordinairement ledit chien, je ne pouvais que venir à sa rencontre. Mes éclaircissements te conviennent-ils ?

Je dus me mordre les lèvres pour ne pas succomber à la tentation d’éclater de rire. Ainsi, au moment même où je pensais l’avoir définitivement chassé de ma mémoire, le destin ― ou était-ce autre chose ? ― me le ramenait sans crier gare.

— Que dirais-tu de nous revoir, ma petite Justine, me demanda-t-il. Serais-tu libre après déjeuner ?

Malgré mes efforts pour amorcer une discussion, je ne parvenais pas à articuler un seul mot. Il s’empressa d’ajouter :

— Je te promets de ne plus te contrarier. Promis.

Plus me contrarier ? Que voulait-il exprimer exactement ? Je me sentais tellement coupable de m’être refusée à ce rapprochement et, curieusement, j’appréhendais un nouveau face-à-face. Pourtant, je désirais tant revivre ces sensations tout juste perçues et que je pressentais agréables. Un conflit intérieur, que je pensais avoir définitivement réglé, resurgissait.

Devant tant de questions, et mue par une curiosité croissante, je cédai à la tentation de le revoir…

□□□

En milieu d’après-midi, alors que je cheminais une fois de plus sur ce sentier coutumier, j’hésitai encore une fois sur ma conduite à tenir. Plus je m’approchais de lui, plus je doutais de moi. Quelques audacieux baigneurs, heureux de profiter du retour du beau temps, osaient défier la fraîcheur de quelques déferlantes. Absorbés par leurs réjouissances, ils ne me virent pas me faufiler discrètement par la « voie cachée ».

Je fus chaleureusement accueillie par le maître des lieux, comme s’il ne m’avait pas vue dans la matinée. Me pressant contre lui, il me caressa amicalement les cheveux, releva mon menton d’un geste qui lui était propre pour m’obliger à croiser son regard. Penaude, je replongeai dans ses yeux couleur noisette. Je sus à cet instant que je ne pourrais plus rien lui refuser, à commencer par mes lèvres qu’il s’empressa de recouvrer avec la même appétence. L’étreinte fut brève, mais tout aussi passionnée.

— Veux-tu que nous allions à l’intérieur ? Je crois que j’ai pris un petit coup de soleil sur la margoulette. Les joies du jardinage n’ont pas que des avantages, se plaignit-il en se frottant le sommet du crâne.

Effectivement, j’observai que son nez avait pris une couleur qui virait à la tomate et que son front était écarlate, ses cheveux coupés court n’avaient pas dû le protéger outre mesure.

— Pourtant, il me semble que tu portais une casquette ce matin ? lui fis-je remarquer.
— Oh, la casquette, je l’ai seulement remise quand j’ai entendu ton chien sur la plage ; je l’avais accrochée en passant sous une branche. Granite n’est pas avec toi ?
— Il dormait sagement dans son panier ; j’ai préféré le laisser tranquille, il s’est suffisamment défoulé ce matin.

Nous entrâmes directement dans la pièce de réception par la porte-fenêtre grande ouverte. Mes yeux, pas encore habitués à la pénombre, mirent quelques secondes pour distinguer le désordre ambiant : des vêtements et des magazines étaient jetés sur le canapé et à même le sol. J’en fus extrêmement étonnée : mes précédentes visites m’avaient laissée sur une impression contraire, tant discipline et rigueur semblaient être l’apanage du maître de céans.

Se voyant pris en défaut, affectant un air dépité, il se mit à mettre un semblant d’ordre. Les revues prirent prestement place dans un casier sous la table basse. Tout aussi vivement, sans s’excuser, il quitta la pièce les bras chargés des effets épars.

Restée seule, j’en profitai pour mieux appréhender les lieux. Je fus surprise de distinguer la silhouette d’un piano d’étude dans un recoin plus sombre de l’immense séjour ; je ne l’avais pas remarqué lors de mes précédents passages.

Philippe réapparut et vint se poster face à moi. Il enserra mes menottes. Le faciès marqué d’une inhabituelle fatigue, il m’annonça :

— Désolé de te recevoir dans un tel désordre, mais ces derniers temps je n’avais plus goût à rien.

Le ton me sembla empreint de reproche, aussi je m’enquis sur-le-champ :

— Ce n’est pas à cause de moi, j’espère ?
— Un peu… Mais il y a prescription, surtout maintenant que tu es là, répondit-il, la mine grave.

Je ne savais comment interpréter sa réplique. Me sentant fautive de son abattement, je ne cherchai nullement à en réfuter la cause et préférai garder le silence. Gardant mes mains captives, il poursuivit :

— Je vais être franc, je n’ai cessé de penser à toi ces derniers jours.

Devant son inhabituelle apathie, d’une innocence mal feinte, je tentai de minimiser cette affliction :

— Comment ça ? Tu as pensé à moi ?
— Pensé, rêvé, appelle ça comme tu veux. Être privé de ta présence m’est devenu insupportable.

Perturbée, profondément affectée par cette poignante révélation, mais n’en voulant rien laisser paraître, je me dirigeai vers le piano, le choisissant comme prétexte pour fuir cette peine exprimée sans pudeur. Je ne pus résister à la tentation de prendre place devant l’instrument de belle facture. Une partition ouverte sur le pupitre affichait une sonate de Chopin ; j’effleurai le clavier, entamant le premier mouvement.

Discrètement, Philippe s’assit à mon côté sur un bout de la banquette, visiblement subjugué par ma pourtant modeste prestation. Le regard figé sur le ballet de mes doigts gourds, ses traits se détendirent peu à peu, faisant place au petit sourire malicieux que j’affectionnais tant. À regret, les poignets devenus douloureux par manque d’exercice, je dus vite abandonner mon jeu.

— Tu ne te débrouilles pas si mal, se plut-il à remarquer, plein d’indulgence.
— J’ai peu pratiqué, au grand dam de mes parents mais pour le bien-être des tympans de ma prof… et de mes voisins. Tu en joues régulièrement ?
— Rarement… en fait, c’est celui de mon épouse.
— Tu es marié ? m’enquis-je, stupéfaite.
— Je l’ai été… plusieurs années. Mais ma vie, me tenant souvent éloigné, a fini par nous désunir pour de bon.

Il soupira et poursuivit :

— Je ne me suis jamais résolu à me séparer du seul objet qui me reste d’elle. Elle pouvait y passer des heures…

À sa voix imperceptiblement chevrotante, je devinai un trouble intérieur qu’il peinait à masquer. La chaleur de sa paume sur mon poignet me fit relever la tête. De fines larmes perlaient de ses yeux rougis par l’émotion. Prenant conscience de son bouleversement, je me sentis envahie d’une sensation étrange.

Étais-je coupable de cette tristesse qu’il affichait sans fard ? Avais-je réveillé un souvenir enfoui ? Avivé un sentiment d’amertume ? La carapace sous laquelle il se protégeait n’était qu’une fragile armure perméable aux sentiments. Sous une apparence froide et austère, je devinais un homme d’une extrême sensibilité, apanage qui était loin de me laisser indifférente.

Sa main tremblotante remonta vers mon épaule, se posa sur ma nuque, m’attirant vers ses lèvres goulues qui me dévorèrent avec une passion intacte. Sous l’agitation de sa langue experte, mêlant nos salives avec une volupté dévorante, je n’esquissai cette fois aucun geste de recul envers cette dextre hardie qui se glissa sous ma jupette, laissant ses doigts effleurer la peau délicate à l’intérieur de mes cuisses.

Ce contact avait d’emblée créé une véritable effervescence au plus profond de mon ventre, libérant des sécrétions intimes dont je ressentais déjà les épanchements humidifier mes vaporeuses dentelles. Fondant littéralement sous ses attouchements, anxieuse et impatiente, je n’en espérais plus que l’aboutissement.

La banquette du piano s’avérant peu accueillante pour nos tendres effusions, il se releva avec calme tout en m’invitant à le suivre vers la zone salon. Il me guida vers le canapé et m’y coucha avec une délectable attention, me déposant comme un objet précieux au fond de son écrin. Se penchant sur moi, il chercha à prolonger la fusion de nos bouches encore avides de doucereux mélanges.

Je m’abandonnai entièrement à ses fougueuses embrassades, partageant la même voluptueuse frénésie. Tout mon être était assailli de doux frissons ; le moindre de ses touchers affolait mes sens en éveil. Languissante sous le poids de son torse, je le sentis s’aventurer sous mon tee-shirt à la découverte de mes formes juvéniles. Fermant les yeux – non par pudeur, mais pour mieux goûter à ses fureteuses palpations – je le laissais m’emporter bien au-delà des rêves que je m’étais forgés durant cette longue année peuplée de souhaits et d’espérances.

Sans que j’en aie pleinement conscience, débardeur et bustier passèrent le cap de mes épaules, laissant les lèvres affamées de mon bienheureux assaillant virevolter sur ma chair indécente. D’abord hésitant, il profita de l’égarement dans lequel me plongeaient ces délices encore inconnus pour palper les monticules de mes seins à tour de rôle, les malaxer, les pétrir, prenant un malin plaisir à en pincer les pointes durcies par l’exaltante perspective à laquelle je m’étais promis de ne plus me refuser.

Ayant abandonné toute réserve, je permis à Philippe de me téter goulûment tandis que ses doigts se perdaient dans les plis désordonnés de ma jupe. Respiration bloquée, enivrée d’un bien-être à peine reconnu, je le laissai me délester de ma fine étoffe sans résistance. Les jambes soutenues par l’une de ses épaules, comme dans une scène irréelle, je vis ma légère soierie glisser le long de mes chevilles et s’envoler hors de mon champ de vision.

Je me sentis tirée vers le rebord du canapé, les fesses relevées sur l’un des accoudoirs. Sans autre ménagement, Philippe ouvrit le compas de mes jambes, retenant mes genoux repliés contre ma poitrine. La hardiesse de son geste provoqua un délicieux frisson qui se propagea dans tout mon corps ; pour la première fois je me dévoilais pleinement à la vue d’un homme.

En découvrant mon sexe uniquement paré de son flavescent duvet, ses yeux s’embrasèrent, comme électrisés par une vive exaltation. À ce moment précis je compris l’influence de la stimulation engendrée par la vision de ma féminité sur son désir d’homme. Nullement offensée d’être ainsi vulgairement troussée, je lui exposai avec une lubricité encore inconnue la preuve de ma nature qu’il contemplait, la mâchoire pendante, avec un ravissement non feint.

Ses doigts séparèrent délicatement les lobes de ma virginale corolle ; la chaleur de son souffle sur mes pétales déployés attisa le feu de mon bas-ventre. Sa langue se mit à explorer l’intérieur de mes replis charnus, en fouilla l’évasure et je tombai en pâmoison sous ses exquis lapements. Même dans mes plus frénétiques stimulations nocturnes, je n’avais jamais ressenti de telles palpitations au cœur de ma vertu.

En me faisant tourmenter le minuscule bourgeon niché sous le mont de Vénus, je découvrais que l’organe de la parole disposait d’une autre forme d’expression et qu’une certaine volubilité pouvait se conter autrement que par des mots. La fulgurance d’une onde de volupté me fit lâcher un profond soupir de ravissement. Dans un geste réflexe, je refermai mes jambes, tenant involontairement prisonnière la tête de mon divin bourreau qui, ne voulant en rien céder la place, s’empressait à aspirer la sève suintant de mes muqueuses. Le visage enfoui entre les ourlets de ma fleur épanouie, il me tenait de la manière la plus favorable à ses polissonneries et se livra à un examen poussé du voisinage avec la même ivresse. Acceptant une fouille qui m’aurait parue fort humiliante en d’autres circonstances, je me délectai de sa privauté et le laissai se repaître de mon fessier jusqu’à satiété.

D’un bond rapide, il se déroba. Je n’eus qu’à peine le temps de l’entrapercevoir, titubant presque, le bas-ventre serré dans les mains, vers ce qui me sembla être la salle de bains. Sa fuite m’incommoda sur l’instant, par son incompréhension et par le fait qu’elle marquait la fin des ravissements auxquels je ne souhaitais nullement me soustraire.

Son absence se prolongeant, devant l’incongruité du désordre où elle me laissait, je me mis à la recherche de mes vêtements. Un bruit d’eau qui coule me parvenait de la pièce où Philippe s’était réfugié, stimulant mon imagination : la « bosse » avait de nouveau manifesté sa réalité… et exigeait cette fois une exclusive attention !

Au retour de mon bienfaiteur, égayée par cette licencieuse pensée, je revêtais ma soyeuse parure retrouvée suspendue comme un trophée à l’oreille d’une chaise. Philippe vint se placer dans mon dos pour m’étreindre avec tendresse. Tout en me mordillant
chaleureusement le cou, il glissa une main dans ma culotte pour englober le renflement de ma motte. Il parvint à me questionner :

— Tu as apprécié que je te taquine la fraise ?

Tentant vainement de fuir ses chatouilles d’un mouvement d’épaule, je n’osai lui révéler que j’étais encore désireuse de ses lutineries, qu’il pouvait m’utiliser de tout son soûl pour étancher sa soif de volupté. À présent, je savais qu’il était devenu inutile d’en exprimer le souhait : nos prochaines rencontres ne pourraient être autres que charnelles…

Auteure : Inanna

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